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Grèce - 7 juillet 2015
Par Manlio Dinucci
Edition de mardi 7 juillet 2015 de il manifesto
Le « tête à tête » dans le référendum grec, dont les grands médias ont fait la propagande, s’est révélé un sonore coup de tête dans le mur pour les fauteurs internes et internationaux du « Oui ». Le peuple grec a dit « Non » pas seulement aux mesures d’ « austérité » imposées par Ue, Bce et Fmi, mais, de fait, à un système -celui du capitalisme- qui étouffe la réelle démocratie.
Les implications du référendum vont au-delà de la sphère économique, en entraînant les intérêts politiques et stratégiques non seulement de Bruxelles, mais (chose dont on ne parle pas) ceux de Washington. Le président Obama a déclaré être « profondément impliqué » dans la crise grecque, que « nous prenons en sérieuse considération », en travaillant avec les partenaires européens afin d’ « être prêts à toute éventualité ».
Pourquoi tant d’attention sur la Grèce ? Parce qu’elle est membre non seulement de l’Ue mais de l’Otan. Un « solide allié », comme la définit le secrétaire général Stoltenberg, qui joue un rôle important dans les corps de déploiement rapide et donne le bon exemple dans la dépense militaire, à laquelle il consacre plus de 2% du pib, objectif atteint en Europe seulement par la Grande-Bretagne et l’Estonie. Bien que Stoltenberg assure « l’engagement continu du gouvernement grec dans l’Alliance », à Washington on craint que, en se rapprochant de la Russie et de fait de la Chine, la Grèce de Tsipras ne compromette son appartenance à l’Otan. Le premier ministre Tsipras a déclaré que « nous ne sommes pas d’accord avec les sanctions contre la Russie » et, au sommet Ue, a soutenu que « la nouvelle architecture de la sécurité européenne doit inclure la Russie ».
Dans la rencontre Tsipras-Poutine, en avril à Moscou (photo ci-dessus), on a parlé de la possibilité que la Grèce devienne le hub européen du nouveau gazoduc, remplaçant le South Stream bloqué par la Bulgarie sous la pression des USA ; nouveau gazoduc qui à travers la Turquie apportera le gaz russe au seuil de l’Ue.
Il y a en outre la possibilité que la Grèce reçoive des financements de la Banque pour le développement créée par les Brics (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) et de la Banque d’investissements pour les infrastructures asiatiques créée par la Chine, qui veut faire du Pirée un important hub de son réseau commercial.
« Une Grèce amie de Moscou pourrait paralyser la capacité de l’Otan à réagir à l’agression russe », a prévenu Zbigniew Brzezinski (ancien conseiller stratégique de la Maison Blanche), exprimant la position des conservateurs. Celle des progressistes s’exprime par la voix de James Galbraith, enseignant en Relations de gouvernement et business à l’Université du Texas, qui a travaillé pendant quelques années avec Yanis Varoufakis, devenu ministre des finances grec (aujourd’hui démissionnaire), auquel il a fourni une « assistance informelle » ces derniers jours.
Galbraith soutient que, malgré le rôle joué par la Cia dans le putsch de 1967, qui porta au pouvoir en Grèce les colonels avec le plan « Prométhée » de l’Otan, « la gauche grecque a changé et ce gouvernement est pro-américain et fermement membre de l’Otan ». Il propose donc : « Si l’Europe échoue, les Etats-Unis peuvent agir pour aider la Grèce, laquelle, étant un petit pays, peut être sauvée avec des mesures mineures, parmi lesquelles une garantie sur les prêts » (« US must rally to Greece », The Boston Globe, 19-2-15).
Les deux positions sont dangereuses pour la Grèce. Si à Washington prévaut celle des conservateurs, se dessine un nouveau plan « Prométhée » de l’Otan, une « Place Syntagma » sur le modèle de « Place Maïdan » en Ukraine. Si c’est celle des progressistes qui prévaut, c’est une opération d’empreinte néo-coloniale qui ferait tomber la Grèce de Charybde en Scylla.
L’unique voie reste celle d’une dure lutte populaire pour la défense de la souveraineté nationale et de la démocratie.
Source : Il Manifesto
Traduction : Marie-Ange Patrizio
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